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Le poil à gratter… 
Lettre d’information de Cynorrhodon – FALDAC  
www.cynorrhodon.org  


N° 132 – septembre 2023  

  ISSN 2264-0363
 

Christophe Rolland












Sans titre, 2003





Paul Klee
Ein Haus, 1915




Paul Klee
Drei Häuser an der Brücke, 1922




Paul Klee
Drei Häuser, 1922



Modèle d’enveloppe





Encre ferro-gallique, 2021



Encre ferro-gallique, 2021



Aquarelle, 2021



Aquarelle, 2012



Sumi, 2021



Pointe d’argent, 2020



Pointe d’argent, 2020

Les songes descendent parfois si profondément dans un passé indéfini, dans un passé débarrassé de ses dates, que les souvenirs nets de la maison natale paraissent se détacher de nous.

Gaston Bachelard[1]

Christophe Rolland est un artiste discret. Sa discrétion naturelle fait écho à celle louée par Euripide : « C’est une chose précieuse qu’une langue dont la discrétion est sûre[2] » ou par Molière : « La parfaite raison fuit toute extrémité / Et veut que l’on soit sage avec sobriété[3] » ou bien encore par Jules Renard « C’est le jeûne qui fait le saint, et la sobriété, l’homme de bon sens[4]. » Pour autant, Christophe Rolland ne se complaît pas dans une forme d’isolement ou de misanthropie. Bien au contraire, il est tout entier au service des autres, que ce soit en tant que conseiller municipal de son village, que membre du conseil d’administration d’une association assurant la promotion de jeunes plasticien(ne)s ou qu’organisateur ou commissaire bénévole d’expositions d’art de notre temps.

     J’ai découvert le travail de Christophe Rolland en 2005, dans son atelier du Minihic-sur-Rance, en Ille-et-Vilaine, bien que sur la rive gauche de la Rance, à quelques encablures de la frontière avec les Côtes-d’Armor. Il pratiquait alors une peinture généreusement colorée, étageant verticalement, dans une sorte de paysagisme abstrait, des bandes horizontales jusqu’au-delà d’un horizon fictif. Les lisières à la limite de champs quasi monochromes généraient des interférences chromatiques, des aires de silence et de méditation. Elles modifiaient localement la coloration, la faisaient rayonner et conféraient aux toiles une aura quasiment mystique. On ne pouvait s’empêcher de penser à la figure tutélaire de Mark Rothko ainsi qu’à l’atmosphère dégagée par certains jardins zen… Du sein de la légère transparence des plages de couleur émergeaient, parfois, des structures évanescentes, des fantômes des apparitions indéterminées, insaisissables, indéfinissables. Même dans des compositions de dimensions modestes, ces tableaux prenaient un caractère monumental.

     Après plus d’une décennie, j’ai été amené à reprendre contact avec l’artiste. Depuis quelques années, après avoir expérimenté plusieurs autres modes d’expression plastique, il se consacrait, de façon quasi monomaniaque, à décliner la même forme sur des feuilles de papier de petit format. Pour ce faire, il recourait à des techniques de dessin les plus diverses, mais répondant toutes aux mêmes exigences de rigueur, de densité, de fluidité, de sensibilité et de profondeur expressive. Le tout dans des tonalités assourdies et homogènes.

     Cette forme unique, qui est encore omniprésente dans ses travaux, est celle, schématisée, du pignon d’une maison, isolée ou multipliée en agrégats pour suggérer des îlots, des quartiers ou de petits villages. Elle évoque celle que Klee utilisait dans plusieurs de ses œuvres des années 1915 à 1922 pour représenter des demeures ou des bourgades. Ce processus obsessif et ludique de construction par variation d’un thème préexistant me fait penser au propos de Pablo Neruda : « J’ai construit ma maison comme un jouet et j’y joue du matin au soir[5]. » Le jeu paraît, en effet, avoir un grand rôle dans ces variations quasi musicales… Il semblerait que la dissolution plus ou moins assumée de l’image d’un logis natal donne aussi raison au propos de Gaston Bachelard cité en exergue à ce texte…

     Mais, le problème est que Christophe Rolland récuse l’idée qu’il figurerait des maisons, réelles ou fantasmées. Pas plus d’ailleurs que l’aspect du mur du fond de son nouvel atelier, jouxtant sa demeure, qui présente aussi la même silhouette. On pourrait aussi trouver une ressemblance avec l’image d’une enveloppe de courrier ouverte, cet objet que l’humoriste étasunien Ambrose Bierce définissait comme : « Le cercueil d’un document, le fourreau d’une facture, l’écorce d’un versement, la chemise de nuit d’une lettre d’amour[6]. » Mais Christophe Rolland refuse aussi cette association… Sans pour autant proposer une autre hypothèse, se bornant à déclarer qu’il s’agit d’une figure qui l’intéresse…

     Cette volonté d’indétermination et cette incertitude cultivée à dessein, que nous avons déjà mentionnées pour ses œuvres anciennes, renvoient à Umberto Eco pour qui l’indéterminé est une catégorie du savoir : « L’incertitude et l’indétermination sont des propriétés objectives du monde physique[7]. » Elles deviennent même des outils de connaissance, d’investigation, d’approfondissement de la réalité physique. L’initiative est donc laissée au regardeur, invité à projeter sur ces dessins son propre univers cognitif, à décider, pour lui et pour lui seul, ce qui est en jeu, ce dont il s’agit, dans la proposition donnée à voir. Si je tiens à y voir des maisons, ce sont des maisons. Si j’y identifie une enveloppe ouverte, c’est une enveloppe ouverte… Et ainsi de suite… Et peut-être tout à la fois, simultanément ou successivement… Cette polysémie immanente constitue un des intérêts majeurs de ces productions.

     L’artiste, dans une très socratique approche, se fait ainsi accoucheur des convictions de l’observateur de ses œuvres. Par une démarche de type maïeutique, il l’accompagne amicalement[8] dans la manifestation de sa propre sensibilité, de son génie personnel. En ceci, il se fait suiveur de Baudelaire, quand il écrivait : « Ne mépriser la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c’est son génie[9]. » Car, il ne faut pas l’oublier, comme le soulignait Henri Lichtenberger : « L’artiste s’adresse à la sensibilité, non à l’intelligence[10]. » Christophe Rolland se comporte donc ici en révélateur – dans le sens donné à ce mot dans les techniques de la photographie – du monde intérieur de ceux qui osent prendre le temps de regarder ses dessins. Il est tout à fait étonnant qu’un motif aussi simple et anodin – un carré ou un rectangle chapeauté par un triangle isocèle – puisse ouvrir aussi largement les portes de l’inconscient individuel et collectif.

     L’instabilité conceptuelle des images créées par Christophe Rolland est confortée par la labilité chimique d’un de ses médiums de prédilection : l’encre ferro-gallique. Utilisée notamment par les Égyptiens dès le IIIe millénaire avant notre ère, presque aussi vieille que l’encre de Chine, elle présente l’avantage d’être plus fluide que cette dernière, du fait de l’absence de pigments ou de colorants. C’est l’action directe du sulfate de fer sur la matière tannique de la noix de galle qui lui donne sa coloration brunâtre, relativement stable si on ne l’expose durablement pas au soleil, ce qui la ferait virer au rouge. Sans être nécessairement chimiste, le regardeur de ces feuilles apprécie la fluidité du geste qui leur a donné vie, appréhende leur fragile précarité, mais ressent aussi leur caractère potentiellement corrosif. Et c’est bien de tout ceci dont il s’agit dans ces compositions et, plus généralement, dans le propos de l’artiste…

     Pour affirmer la fluidité si caractéristique de ses compositions, Christophe Rolland recourt souvent à l’aquarelle, mais aussi, pour certaines feuilles, au sumi japonais, sous forme de bâtonnets confectionnés à partir de suie (susu[11]) et de colle (nikawa[12]) animale, frottés, avant usage, sur une pierre à encre avec un peu d’eau. Devant ces œuvres, je pense irrésistiblement à ce que Charles Du Bos écrivait au sujet de la versification de Valéry : « […] une indéfinissable liquidité avec des matériaux aussi denses, aussi solides, aussi minéraux que possible[13]. » Il faut l’avouer, dans toutes les œuvres de notre artiste, malgré leur évidente liquidité, les surfaces ont des qualités tactiles qui, sans le tabou du noli me tangere associé aux arts plastiques, inviteraient à la palpation. Elles activent, chez le spectateur, par le biais de la vision, une stimulation du toucher, sans pourtant le mettre en œuvre. Ceci est encore plus évident dans les quelques dessins, toujours d’après le même motif, exécutés à la pointe d’argent – autre pratique n’admettant pas le repentir – dans lesquels, sans renoncer aux propriétés des œuvres réalisées avec des mediums liquides, la texture est tactilement perçue comme telle par le seul truchement de l’œil. C’est ainsi que haptique et optique se combinent pour aider celui qui observe attentivement ces feuilles à mieux appréhender la position et les déplacements de son propre corps dans l’espace. Une façon, nonobstant les dénégations de l’artiste, de lui permettre de faire siennes ces multiples maisons qu’il nous invite à habiter…

Louis Doucet, mars 2023



[1] In La Poétique de l’espace, 1957.
[2] καλόν τοι γλῶσσ᾽ ὅτῳ πιστὴ παρῇ, in Iphigénie en Tauride [1064], 414-412 avant J.-C.
[3] In Le Misanthrope, 1666.
[4] In Journal 1893-1898.
[5] «He edificado mi casa también como un juguete y juego en ella de la mañana a la noche», in Confieso Que He Vivido, 1974.
[6] “ENVELOPE, n. The coffin of a document; the scabbard of a bill; the husk of a remittance; the bed-gown of a love-letter”, in The Devil’s Dictionary, 1906-1911.
[7] «L’incertezza e l’indeterminazione sono una oggettiva proprietà del mondo fisico», in Opera aperta, 1962.
[8] Je pense ici au propos du sociologue Francesco Alberoni : « Un ami est toujours habile à la maïeutique, il suscite en nous une réflexion honnête et objective », in L’amicizia, 1986.
[9] In Fusées, journal intime, 1851.
[10] In Richard Wagner, poète et penseur, 1898.
[11] すす.
[12] 膠 : colle (nikawa) en japonais mais aussi matière plastique (jiāo) en mandarin.
[13] In Journal, 1922.


Cinq regards sur l’altérité
Introduction à l’exposition Je est un autre
Maison des Arts de Châtillon
du 15 septembre au 10 décembre 2023









Ariane Kühl
Les âmes errantes, 2018
dessin sur papier de soie
55 x 42 cm



Ariane Kühl
Untitled, 2018
dessin sur papier
24 x 16 cm




Anne Bothuon
Flou hésitation, 2020
sculpture textile
169 x 49 x 68 cm



Anne Bothuon
La femme qui marche, 2020
sculpture textile
taille humaine




Marie Boralevi
Women - Role Model, 2023
techniques mixtes et poudre de graphite sur papier
140 x 100 cm



Marie Boralevi
Persona non grata - The Others die but not me, 2021
techniques mixtes et poudre de graphite sur papier
140 x 100 cm




Hervé Bourdin
Mise en boîte, 2021
matériaux de récupération divers
350 x 200 x 200 cm



Hervé Bourdin
Bus-exit, 2021
matériaux de récupération : bois, boîtes de conserve…
4 x (60 x 30 x 28 cm)




Axel Roy
Espace mode d’emploi, 2019
graphite sur papier, aimants
90 x 150 cm



Axel Roy
Nadir, 2021
graphite sur papier
150 x 300 cm

Je est un autre. Tant pis pour le bois qui se trouve violon,
et nargue aux inconscients, qui ergotent sur ce qu’ils ignorent tout à fait
[1] !
Car Je est un autre. Si le cuivre s’éveille clairon, il n’y a rien de sa faute[2].
Arthur Rimbaud

Le Trésor de la Langue Française donne du mot altérité la définition suivante : caractère, qualité de ce qui est autre, distinct et comme antonyme le mot identité. Les propos de Rimbaud en exergue à ce texte nous plongent dans la perplexité car Je est l’identité par excellence et autre son opposé. Pour autant, il n’est pas question, chez ce jeune poète, de schizophrénie ni de trouble dissociatif de l’identité, autrefois désigné sous le terme dédoublement de la personnalité. Il pose tout simplement la question de l’être, de sa fragmentation, d’une forme de flexibilité identitaire, des articulations du rapport entre identité et altérité… Et, ce, sans développer son point de vue mais en nous révélant, à son habitude, des gouffres qu’il se refuse d’éclairer.

     Il s’agit, chez Rimbaud, de la poursuite d’une réflexion, qui n’a rien de récent, sur une opposition à caractère dialectique entre le soi et l’autre. En effet, dès l’antiquité et le Parménide de Platon, est posée la question du rapport entre le soi unique et identique et la pluralité des autres. Aristote, dans sa Métaphysique, reprend la discussion et conclut que les relations de l’être sont multiples dans leur essence et non réductibles à un seul canal, à une unique connexion dirait-on dans le jargon de notre temps. Bien avant, on peut aussi évoquer le Mon nom est Personne d’Ulysse, chez Homère. Plus tard, la focalisation sur l’éloignement de l’autre dans la poésie des troubadours, l’essai de Montaigne sur les cannibales, le questionnement de Pascal sur Qu’est-ce que le moi ?, celle de Montesquieu sur Comment peut-on être persan ? ou de Mallarmé sur l’impersonnalité du sujet… Plus près de nous, on retrouve ces interrogations dans plusieurs courants littéraires et philosophiques du XXe siècle, dans l’existentialisme, par exemple, mais aussi dans les théories de Lacan, Derrida, Barthes ou Deleuze… Elles sont aussi centrales dans les études postcoloniales qui situent la construction culturelle et nationale dans une tension entre identité et altérité. Il en est de même quand on aborde la question de l’identité sexuelle, objet des travaux de la critique féministe ou des gender studies anglo-saxonnes.

     La présente exposition livre les réponses de cinq plasticien(ne)s à la question, très large, de l’altérité, telle qu’elle a été définie ci-dessus. Elles et ils mettent clairement en évidence le propos de Roland Barthes : « […] c’est l’un des traits constants de toute mythologie petite-bourgeoise, que cette impuissance à imaginer l’Autre. L’altérité est le concept le plus antipathique au bon sens[3]. »

     Ariane Kühl est une jeune artiste plasticienne, formée à l’histoire de l’art, qui s’exprime principalement à travers le dessin. La plupart de ses productions se présentent comme des ensembles de feuilles légères, translucides, de dimensions variées, pouvant dépasser deux mètres de largeur, traitées, lentement et patiemment, à l’encre de Chine noire, saturées de tracés vermiculaires d’où émergent des visages placides. Son geste créateur est obsessionnel mais répond à un schéma génésique qui engendre des formes dont on ne peut dire si elles sont animales ou végétales. De ces entrecroisements surgissent des physionomies sans orbites, comme des masques, plus mortuaires que vénitiens, inspirés en grande partie par la statuaire romaine. Elles paraissent et flottent, tels des fantômes en quête de libération des liens qui les retiennent, mais apparemment résignés à y demeurer pour ce qui ne peut être qu’une éternité. Elles demeurent anonymes, même si l’on peut, parfois, les assimiler aux effigies posthumes de personnages historiques. Mais très vite, leur environnement reprend le dessus. Elles fusionnent avec lui et disparaissent pour reparaître ensuite, comme en recherche permanente d’une reconnaissance, d’une identité qui ne viendra pas.

     Les personnages sculptés d’Anne Bothuon, un peu plus grands que nature, sont réalisés en toile de coton, en feutre, en fil et en ouate, sur des armatures de fer, le fil creusant, resserrant les chairs, mais aussi dessinant le contour d’une bouche, la forme d’un œil. Ses corps transpercés, ficelés, ligaturés, évoquent des écorchés dans un laboratoire d’anatomie. Ils sont figurés sans complaisance, obèses, callipyges, avec des bourrelets disgracieux, des seins tombants… Ce sont des corps du quotidien, avec leurs beautés et leurs défauts, traités avec une grande empathie. Aux antipodes des canons d’une norme esthétique que les médias – exprimant une vision essentiellement masculine – veulent imposer. Malgré les visages déformés, sujets à des rictus dont on ne sait s’ils sont de douleur ou des éclats de rire, après une première sensation d’attraction-répulsion, ces êtres trop humains appellent la sympathie et dégagent un curieux mélange de douceur ironique et d’humour aigre. Bien que joviaux, ils nous interpellent, peuvent même nous menacer. Tout se mue alors en une scène d’un théâtre de la cruauté, sans la moindre complaisance, qu’Antonin Artaud n’aurait probablement pas récusée.

     Formée à la gravure à l’École Estienne, Marie Boralevi pratique principalement le dessin en mettant en œuvre un processus complexe. Elle commence par composer une image numérique en mêlant, juxtaposant, stratifiant des photographies de visages, d’organes et de fragments anatomiques. Elle l’agrandit et la transfère chimiquement sur du papier Japon en l’altérant pour en dissoudre les formes. Elle dessine alors au graphite sur l’image résultante pour en densifier les traits et la texture. Dans sa série récente, Persona non grata, 2019-2022, elle crée de toutes pièces des personnages au caractère androgyne, irréels mais plausibles, réalistes mais rêvés, véridiques mais trompeurs, simultanément vrais et faux, dont la nature demeure indécise et pousse le spectateur à admettre l’existence d’un autre auquel il a du mal à s’identifier. Avec ces dessins, nous quittons le monde de la description ou d’une quelconque narration pour aborder un questionnement universel sur l’identité personnelle. Il en va de même dans sa série Women, 2023, qui chamboule les stéréotypes prétendument consensuels de la beauté féminine. Tous ces corps aux regards froids et neutres, déchirés entre naturalité et artificialité se présentent comme des éloges d’un certain mauvais goût.

     Venu de la gravure et de la sculpture, passé par la peinture et le dessin, Hervé Bourdin jette, dans ses installations et dans ses peintures, un regard acide, corrosif, décapant, mais aussi rempli d’une profonde empathie pour les personnages mis en scène. Tragédie et grotesque s’y côtoient toujours. Par certains aspects, son graphisme évoque celui de la bande dessinée, domaine que l’artiste a investi en produisant des albums qui donnent à ses compositions une dimension narrative plus explicite. Il ne recherche pas l’effet plastique, comme le font tant d’artistes de notre temps : la forme reste seconde par rapport au sens et vient comme un supplément pour appuyer le propos. Un propos direct, qui rejette la métaphore, pour placer le spectateur face à ses responsabilités, à l’autre, aussi différent ou étranger soit-il. Ses œuvres se comportent, en quelque sorte, comme des miroirs réfléchissant notre propre indifférence à l’autre, notre propre inhumanité. Ses installations récentes recourant à des matériaux de récupération, notamment des boîtes de conserve, illustrent, en termes plastiques et avec un humour grinçant, les effets des récents confinements que nous avons dû subir. L’humanité, condamnée à se nourrir de conserves et recluse dans ces mêmes boîtes…

     Dans les dessins au graphite sur papier d’Axel Roy, il est question de déambulation humaine dans des espaces publics, emplis de personnages. Les individus qu’il met en scène sont des anonymes, photographiés dans la rue, sélectionnés à leur insu selon un protocole préalablement établi. Axel Roy transpose ensuite, minutieusement, à main levée, en noir et blanc, au crayon gras, sans recourir à un épiscope, des fractions détourées des clichés, dans une technique lente et laborieuse de dégradés, d’estompage, de modelage dont la virtuosité évoque celle des hyperréalistes. Sur la même feuille peuvent coexister des fragments à des échelles différentes, espacés de façon plus ou moins régulière. On ne peut s’empêcher de penser à un processus d’échantillonnage d’attitudes humaines comme on pourrait en voir sur des planches-contact photographiques mais, très vite, le spectateur se rend compte que les espaces entre les différentes plages dessinées sont au moins aussi importants que les figures. L’artiste recrée ainsi distance ou proximité, suscite des interactions entre des personnages qui n’avaient, normalement, aucune chance de se rencontrer ni dans le temps ni dans l’espace.

Louis Doucet, mai 2023



[1] Lettre à Georges Izambard, 13 mai 1871.
[2] Lettre à Paul Demeny, 15 mai 1871.
[3] In Mythologies, 1957.


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